L’immunothérapie antitumorale, ses effets secondaires et leur prise en charge

L’immunothérapie antitumorale, ses effets secondaires et leur prise en charge

L‘immunothérapie, aussi connue sous le nom d’inhibition du point de contrôle immunitaire, a révolutionné les soins oncologiques. De nombreux cancers métastatiques, comme les mélanomes, le cancer du poumon, de la vessie et du rein, qui étaient auparavant mortels dans les mois suivant le diagnostic, peuvent maintenant être traités au moyen de thérapies qui permettent une survie à long terme.

Comment l’immunothérapie fonctionne-t-elle?

Ils ciblent une protéine précise exprimée sur la membrane des certaines cellules tumorale. Ils bloquent l’interaction entre la cellule tumorale et la cellule immunitaire effectrice (cellule dendritique ou lymphocyte) à l’origine de la réponse immunitaire antitumorale spécifique. Ces médicaments ont pour objectif principal de lever l’inhibition de la réponse immune cytotoxique spécifique que peut être induite par les cellules tumorales. (Figure 1) [1]

Figure 1

Figure 1.


Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire : médicaments existant [2]

Point de contrôle 

Nom du médicament 

Type d’anticorp

Indications

 

 

Les inhibiteurs du CTLA-4 

 

 

Ipilimumab 

 

anticorp monoclonal anti-CTLA-4 entièrement humain (IgG1)

lanome, carcinome à cellules rénales, cancer bronchique non à petites cellules, mésothéliome pleural malin, cancer colorectal carcinome épidermoïde de l’œsophage

 

Tremelimumab 

anticorp monoclonal anti-CTLA-4 entièrement humain (IgG1)

carcinome hépatocellulaire, cancer bronchique non à petites cellules

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les inhibiteurs du PD-1

Pembrolizumab

anticorp monoclonal anti-PD-1 humanisé(IgG4) 

lanome, cancer bronchique non à petites cellules, lymphome de Hodgkin classique, carcinome urothélial, carcinome épidermoïde de la tête et du cou, carcinome à cellules rénales, cancer colorectal,cancers MSI-H ou dMMR,cancer de l'œsophage, cancer du sein triple négatif, cancer de l’endomètre, c.ancer du col de l'utérus

Nivolumab

anticorp monoclonal anti-PD-1 entièrement humain (IgG4)

lanome, cancer bronchiquenon à petites cellules, mésothéliome pleural malin, carcinome à cellules rénales, lymphome de Hodgkin classique, cancer épidermoïde de la tête et du cou, carcinome urothélial, cancer colorectal, carcinome épidermoïde de l’œsophage,adénocarcinome gastrique, de la jonction œso-gastrique ou de l’œsophage

Cémiplimab

anticorp monoclonal anti-PD-1 entièrement humain (IgG4)

carcinome épidermoïde cutané, carcinome basocellulaire, cancer bronchopulmonaire non à petites cellules

 

 

 

 

 

Les inhibiteurs du ligand PD-L1

Atézolizumab

anticorp monoclonal anti-PD-L1 humanisé (IgG1) 

carcinome urothélial métastatique ou localement avancé, du cancer bronchique non à petites cellules

Avélumab

anticorp monoclonal anti-PD-L1 humanisé (IgG1) 

carcinome à cellules de Merkel métastatique de ladulte, carcinome urothélial à un stade localement avancé ou métastatique, carcinome à cellules rénales à un stade avancé

Durvalumab

anticorp monoclonal anti-PD-L1 humanisé (IgG1)

cancer bronchique non à petites cellules  

 


Comment l’immunothérapie est-elle administrée ? 

Les anticorps anti CTLA-4, anti-PD-1 et anti PD-L1 sont administrés par voie intra-veineuse, en cycles de 2 à 6 semaines.


Quels sont les effets secondaires de l’immunothérapie et comment seront-ils prise en charge ?

Les effets indésirables majeurs avec cette classe médicamenteuse consistent en des évènements immuno - induits. Leur mécanisme physiopathologique n'est pas entièrement élucidé, mais comme de nombreuses cellules saines (non tumorales) expriment aussi à leur surface les protéines responsables de ces points de contrôle immunitaire (PD-1, PD-L1, CTLA-4), ces cellules peuvent alors devenir la cible du système immunitaire lors de la réactivation des lymphocytes T. Les effets indésirables immuno- induits les plus fréquemment vus en pratique clinique sont les colites, les thyroïdites, les pneumopathies, les atteintes cutanées. Les myocardites immuno- induites sont parmi les effets immuno- induits les plus rares (probablement <1%), mais sont les plus graves avec une mortalité pouvant atteindre 30 à 50%. [2]

Les effets secondaires des traitements pour le cancer sont classés en fonction de leur degré de sévérité, sur une échelle de 1 à 4, en fonction de leur gravité croissante. Les effets secondaires du 1er degré sont considérés comme légers, ceux du 2e degrés modérés, du 3e degré graves et du 4e degrés très graves. Cependant, le critère précis utilisé pour assigner un degré à un effet secondaire spécifique varie en fonction de l’effet secondaire considéréré. L’objectif est de toujours identifier et traiter tout effet secondaire avant qu’il ne s’aggrave. C’est très important par conséquent toujours de signaler dès que possible tout symptômeôme inquiétant à l’équipe oncologique.

Le tableau ci-dessous fournit un aperçu général des stratégies typiques de prise en charge des effets secondaires liés à l’immunitéé les plus fréquents. Ce tableau ne vise toutefois pas à remplacer l’avis de l‘oncologue qui connaît le dossier médical complet. [3]

Tableau-01

Tableau 2

Tableau 3Tableau 4

Prise en charge des effets secondaires rares

Type de symptômes 

Manifestations 

Prise en charge 

Neurologiques 

faiblesse musculaire, engourdissement, difficultés respiratoires

en cas de symptômes du 2e degré ou plus: corticoïdes par voie orale ou intraveineuse

Rhumatologiques

douleurs musculaires ou articulaires

antalgiques par voie orale (en cas de symptômes allant de légers à modérés), voire sur une faible dose de corticoïdes par voie orale (en cas de symptômes modérés). En cas de symptômes graves, une consultation chez un spécialiste et une forte dose de corticoïdes ou d’immunosuppresseurs par voie intraveineuse pourraient se révéler nécessaires.

 

Rénaux

térioration significative de la fonction rénale

corticoïdes par voie intraveineuse et lintervention dun spécialiste ; parfois nécessaire dinterrompre temporairement ou définitivement le traitement par inhibiteurs de points de contrôle.

Cardio-vasculaires

myocardites, péricardites, vascularites

lintervention rapide d’un cardiologue, traitement à base de corticoïdes ou autres immunosuppresseurs à haute dose

 

Le principe général pour la prise en charge des effets secondaires liées au traitement par des inhibiteurs de points de contrôle est tout d’abord d’identifier rapidement les symptômes et de faire correctement un diagnostic différentiel. C’est très important par conséquent toujours de signaler dès que possible tout symptôme qui pourrait etre lié à l’immunothérapie à l’équipe oncologique. Si les effets secondaires de 1er et 2e degré peuvent être gérés en ambulatoire, par un traitement qui souvent suppose des corticoïdes oraux, initié par le médecin oncologue et surveillé par le médecin de famille, à partir du 3e degré une hospitalisation s’impose. [3] [4] [5] (Figure 2)

Figure 2 3

Figure 2. (3)


CONCLUSIONS

L’immunothérapie a changé irrévocablement le domaine de l’oncologie, mais il en reste beaucoup à apprendre en ce qui concerne l’utilisation optimale de ces agents, sur l’identification, la prise en charge et la prévention de la toxicité. Étant donné l’élargissement des indications de l’immunothérapie et la possibilité que les effets secondaires se produisent des mois après le traitement, les médecins doivent de plus en plus se tenir au fait de ces agents et de la gamme des événements indésirables potentiels afin de pouvoir efficacement prendre en charge leurs patient atteints de cancer, conjointement avec les oncologues.

Dr Corina-Mihaela FILIP, médecin spécialisé en hématologie


Références :

1.    https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1773035X22001794#!

2.    https://pharmacomedicale.org/medicaments/par-specialites/item/immunothe…

3.    https://www.esmo.org/content/download/138227/2546564/1/FR-Guide-pour-le…

4.    Haanen JBAG, Carbonnel F, Robert C, et al. Management of toxicities from immunotherapy: ESMO Clinical Practice Guidelines for diagnosis, treatment and follow-up. Ann Oncol 2017;28(suppl_4):iv119-iv142

5.    Champiat S, Lambotte O, Barreau E, et al. Management of immune checkpoint blockade dysimmune toxicities: a collaborative position paper. Ann Oncol 2016;27(4):559-574.